Primo Levi : Si c'est un homme
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Fiche historique : KL Auschwitz - Birkenau - Monowitz et Kommandos extérieurs

Dès la fin de 1939, la Silésie polonaise a été intégrée au Reich (Province de Haute-Silésie : Reichsgau Oberschlesien) et la ville d’Oświęcim a repris son nom d’Auschwitz du temps où elle faisait partie de l’empire d’Autriche-Hongrie.

En février 1940, les Allemands décidèrent l’aménagement des casernes polonaises d’artillerie d’Oświęcim pour y créer un camp de détention dont le SS-Hauptsturmführer Rudolf Höss a été nommé commandant en avril.

En mai, 30 criminels de droit commun allemands de Sachsenhausen arrivèrent au KL Auschwitz. Ils furent employés à l’encadrement des détenus polonais internés le mois suivant.

Pendant l’été, les familles polonaises des secteurs réservés à la zone du camp et aux logements des SS furent expulsés et la « SS-Siedlung Auschwitz » (Établissement des SS d’Auschwitz) a été établie entre la voie ferrée et la rivière Soła, dans une partie de l’ancienne ville d’Oświęcim. Au-delà, entre la Vistule et la Soła, a été créée la « Interessengebiet des KL Auschwitz » (Zone d’intérêts du KL Auschwitz) d’une superficie d’environ 40 km².

 

Le camp d’Auschwitz est ainsi devenu l’élément central d’une véritable cité SS.

 

Le 14 juin, un premier convoi de 728 prisonniers politiques polonais parmi lesquels des Juifs, venant de Tarnów, est arrivé à Auschwitz. Ils furent internés jusqu’en juillet à deux cents mètres du camp en aménagement, dans les bâtiments de l’ancien Monopole polonais des tabacs.

Dès le début de juillet le premier four crématoire au coke de la firme Topf und Söhne d’Erfurt a été mis en construction dans l’ancienne poudrière de la caserne polonaise, le futur Crématoire I. À la mi-juillet, l’insecticide Zyklon B a été utilisé pour la première fois pour la fumigation d’une baraque.

En novembre 1940, alors que le SS-Reichsführer Heinrich Himmler avait décidé de faire de la Silésie un grand centre d’exploitations agricoles, des négociations ont été engagées au niveau gouvernemental (Hermann Goering, chef du Plan économique de quatre ans) avec la société I.G. Farbenindustrie pour l’implantation en Silésie, riche en matières premières et en voies de communication, d’une usine de Buna (caoutchouc synthétique). La SS promit la disponibilité illimitée d’une main d’œuvre servile, louée à bas prix aux entreprises.

Le camp et l’activité économique qui lui était liée n’ont pas cessé alors de se développer.

Le 1er mars 1941, Himmler se rendit à Auschwitz. Il décida de faire passer à 30 000 le nombre de détenus du KL Auschwitz, de fournir 10 000 détenus à l’I.G.Farben pour la construction d’une zone industrielle sur l’emplacement du village de Dwory, de développer l’agriculture, de construire à Brzezinka (Birkenau) un camp pour 100 000 prisonniers.

 

Mais Auschwitz n’a pas eu seulement une fonction de répression de la résistance en Pologne et en Europe tout en fournissant des esclaves aux entreprises.

En juillet 1941, eut lieu la première sélection par le docteur SS Horst Schumann, dans le cadre du programme d’euthanasie, de 575 détenus d’Auschwitz malades. Les prisonniers désignés furent emmenés en Saxe dans un établissement pour malades mentaux où ils ont été asphyxiés au monoxyde de carbone. En août, le SS-Obersturmbannführer Adolf Eichmann, le chef du Referat (Service) IV D4, du SS-RSHA, qui s'occupait des « affaires juives, de l’émigration et de l'évacuation » est venu à Auschwitz. À la fin de l’été, ont eu lieu les premiers gazages expérimentaux de personnes, malades et prisonniers soviétiques, au Zyklon B au KL Auschwitz dans les caves du bloc 11.

Au cours du mois d’octobre, 10 000 prisonniers soviétiques ont été internés au KL Auschwitz dans un Camp de travail pour les prisonniers de guerre russes (Russisches Kriegsgefangenen Arbeitslager) alors que se précisaient les projets de construire à Birkenau de gigantesques crématoriums.

A la fin de l’année 1941, les premiers gazages de prisonniers soviétiques épuisés et de Juifs ont commencé dans la morgue ventilée du Crématoire I alors que Birkenau était en construction et que la Zentralbauleitung der Waffen-SS und Polizei Auschwitz (Direction centrale des constructions) était placée sous la responsabilité de Karl Bischoff, pour la construction des grands crématoires et de leurs chambres à gaz.

 

Le 15 février 1942, le premier convoi connu de Juifs de Beuthen (Haute-Silésie) est arrivé à Auschwitz. En mars, les déportés sont arrivés sur la Judenrampe entre le KL Auschwitz et Birkenau et les premières chambres à gaz de Birkenau (Bunker I) furent mises en activité pour assassiner les Juifs dans un projet global : les camions à gazage de Kulmhof (Chełmno) fonctionnaient depuis décembre 1941, les chambres à gaz au monoxyde de carbone de Belzec ont été mises en activité au même moment que celles de Birkenau (mars 1942). Celles de Sobibor le furent en mai et celles de Treblinka en juillet.

 

Les fonctions de camp de concentration et de centre d’extermination d’Auschwitz étaient alors clairement établies et étroitement imbriquées.

 

C’est encore en mars 1942 que fut créée au KL Auschwitz une Section pour femmes prisonnières (Frauenabteilung). Dès la fin avril, la section a regroupé 6 000 femmes alors qu’a été prise la décision de tatouer les détenus de Birkenau dont l’état indiquait qu’ils allaient bientôt mourir ainsi que tous les détenus juifs et que commencèrent les premières sélections. Pendant l’été, les femmes ont été transférées à Birkenau et un secteur particulier a alors été créé pour les hommes.

 

C’est probablement en juin 1942 que Höss a rencontré Himmler à Berlin pour apprendre qu’Auschwitz avait été choisi pour devenir le plus grand centre de l’anéantissement massif des Juifs européens.

De nouvelles chambres à gaz furent installées à Birkenau (Bunker II) alors que commença la construction des grands crématoires. Himmler, qui revint à Auschwitz en juillet, ordonna de ne plus enfouir les corps des victimes, mais de les brûler. Hoess et deux de ses adjoints sont alors allés à Chelmno, en septembre, pour étudier comment les SS brûlaient les victimes des camions à gaz dans de gigantesques brasiers. La méthode fut ensuite mise en application dans le Birkenwald, au nord-ouest de Birkenau.

 

Dans le même temps, les kommandos miniers, industriels et agricoles se sont multipliés, lieux de travail et de mort : au début du mois d’octobre 1942 de jeunes détenues juives, en particulier françaises, ont été massacrées à l’arme blanche par les kapos allemandes et les SS dans le kommando extérieur agricole de Budy alors que les premiers déportés arrivaient au camp de Monowitz installé au sud du complexe des usines de Buna à Dwory.

 

En février 1943, les premiers Tsiganes arrivèrent à Birkenau. Ils furent internés dans le camp des familles tsiganes (Familien Zigeunerlager). Le 6 septembre a été créé également à Birkenau un Camp des familles juives de Theresienstadt (Familienlager Theresienstadt). Mais les camps familiaux, qui différaient la mise à mort, ont été une exception.

Dans la nuit du 13 au 14 mars, 1492 Juifs de Cracovie furent assassinés dans la chambre à gaz du Crématoire II livré officiellement par la Bauleitung le 31 mars. Les trois autres crématoires ont été achevés et livrés dans les mois suivants.

Les détenus ont été non seulement assassinés par centaines de milliers ou soumis au travail forcé, mais ils ont aussi été utilisés comme cobayes par les médecins SS. En avril, Karl Clauberg et Horst Schumann s’installèrent dans le bloc 10 du KL Auschwitz pour effectuer leurs expérimentations « médicales » sur plusieurs centaines de Juives mises à leur disposition. Fin mai, le médecin SS-Hauptsturmführer Josef Mengele devient médecin-chef du camp des Tsiganes.

 

Le 22 novembre 1943, Arthur Liebehenschel, nouveau commandant du camp a annoncé le partage officiel des différents camps :

KL Auschwitz I – Stammlager (camp-souche)

KL Auschwitz II – Birkenau et les camps extérieurs dont la plupart sont des camps d’exploitations agricoles, des fermes d’élevage et de pisciculture.

KL Auschwitz III – Aussenlager Monowitz (camp extérieur de Monowitz[1]) et dix autres camps extérieurs dont la plupart sont des camps d’exploitation industrielle.

 

La routine de l’extermination continuait. Le 26 février 1944, 650 Juifs d’Italie venus du camp de Fossoli sont arrivés à Auschwitz. 29 femmes et 95 hommes dont Primo Levi furent admis dans le camp. Les 526 personnes restantes furent assassinées dans les chambres à gaz.

Dans la nuit du 8 au 9 mars 1944, 3 790 Juifs arrivés de Theresienstadt en septembre 1943 furent gazés. Dans la nuit du 10 au 11 juillet et dans la journée du 12 juillet, 7 000 Juifs survivants de Theresienstadt ont connu le même sort. Le « Camp des familles » avait cessé d’exister.

Enfin, un dernier grand convoi de 2 038 Juifs déportés de Theresienstadt arriva à Birkenau le 30 octobre. 1 689 ont été assassinés dans les chambres à gaz.

 

Les massacres de Juifs redoublèrent encore de violence alors que la Wehrmacht accumulait les défaites sur le front de l’est. À la mi-mai, la voix ferrée qui entrait dans le camp de Birkenau (Bahnrampe) a été mise en service pour l’arrivée des Juifs de Hongrie. Du 3 mai au 8 juillet, 147 trains ont déporté vers Auschwitz et le Reich 434 351 personnes. Un Juif sur trois tués à Auschwitz était un Juif hongrois.

 

Dans la nuit du 2 au 3 août 1944, 2 897 Tziganes furent assassinés et le camp des Tziganes a été liquidé. Mais encore huit cents enfants et adolescents tsiganes qui avaient été auparavant envoyés, avec des adultes, de Birkenau au camp de concentration de Buchenwald comme aptes au travail, ont été de nouveau transférés à Auschwitz et tués dans le Crématoire V, le 10 octobre 1944. 

 

Les alliés ne s’intéressaient qu’à la destruction de l’appareil industriel allemand. Le 20 août, 127 bombardiers de l’USAAF Liberator escortés de 100 chasseurs Mustang ont largué 1 336 bombes de 500 livres sur l’usine de Buna-Werke à Monowitz. Le 13 septembre, 96 bombardiers américains ont encore largué 1000 bombes de 500 livres sur Buna-Werke. Des bombes sont tombées par erreur sur le KL Auschwitz I, endommageant la voie ferrée et tuant 15 SS, 40 détenus dans la zone d’extension du camp et 30 ouvriers civils.

 

Les Juifs du Sonderkommando ont alors tenté une révolte désespérée. Le 7 octobre, le Sonderkommando du Crématoire IV, dirigé par Zalmen Gradowski, s’est révolté. Les armes avaient été fournies par des détenues travaillant dans l’usine de munitions de l’Union-Werke dont une Juive polonaise de 23 ans, Roza Robota, qui avait réussi à établir un contact entre les femmes de l’Union-Werke et des membres du Sonderkommando. 451 détenus et 3 SS furent tués. Le Crématoire IV a été définitivement mis hors d’usage pendant la révolte.

 

En novembre 1944 les assassinats par le gaz ont cessé à Birkenau et le 1er décembre ont commencé les travaux de démolition des Crématoires II et III, dynamités le 20 janvier 1945. Le Crématoire V a été dynamité le 22 janvier.

Le 18 janvier 1945, les SS emmenèrent dans leur repli 58 000 détenus pour lesquels ont commencé les « marches de la mort ».

Les premiers soldats de l’Armée rouge sont arrivés à Monowitz le 27 janvier.

 

 

Pour les nombres des victimes, Francisezk Piper donne les ordres de grandeur suivants :

1 300 000 personnes ont été déportées à Auschwitz. 400 000 ont été enregistrées. 1 100 000 y sont mortes dont environ 200 000 parmi les personnes enregistrées.

1 100 000 Juifs de toutes nationalités ont été déportés à Auschwitz, 200 000 ont été enregistrés dans le camp. 900 000 Juifs sont morts dans les chambres à gaz et 100 000 qui avaient été enregistrés sont morts à la suite des mauvais traitements.

140 000 ou 150 000 Polonais non juifs ont été déportés, 140 000 ont été enregistrés, 70 000 à 75 000 sont morts.

23 000 Tziganes d’origine surtout germanique ont été déportés, 23 000 ont été enregistrés, 21 000 sont morts.

15 000 prisonniers de guerre soviétiques ont été déportés, 12 000 ont été enregistrés, 14 000 sont morts.

25 000 personnes d’autres origines ont été déportées, 25 000 ont été enregistrés, de 10 000 à 15 000 sont mortes.

 

Jean-François Forges



[1]. Dès le 1er décembre, le camp prend le nom d’Arbeitslager Monowitz.